mardi 26 janvier 2010


J'étais partie pour raconter à quel point ma journée a été pourrie, mais en même temps quel intérêt ? D'abord ça y est, je suis rentrée, il fait chaud chez moi (- 4° dehors), le chat ronflotte sur le joli coussin qu'il s'est attribué à peine je l'avais acheté. Ah non il vient de sauter du fauteuil et est sur le point de capturer une proie vu sa position de tigre aux aguets. Je pense que c'est une feuille sèche tombée du ficus. Elle n'en réchappera pas, mon chat est un chasseur redoutable.
Et puis je suis passée remplir le frigo et le congélateur de ma Tchou avant mon stage ce matin, elle était contente. Parce qu'elle a décidé de ne jamais faire de courses, alors elle mange ses stocks jusqu'à ce qu'il n'y en ait plus. Après, c'est sandwich à tous les repas, ça me chiffonne un peu. Mais comme j'ai un côté mère nourricière assez développé, ça me fait du bien de lui remplir ses placards.
Et sinon j'ai reçu un mail de Virginie qui finissait par "gros poutous ma mamounette et merci d'être ma mamounette".
Elle est pas belle la vie ?

samedi 23 janvier 2010

Le poulet au fromage


Dans l'école où mes filles sont allées, l'aboutissement c'est le CM2. Pas parce que c'est la dernière classe, mais parce que c'est l'année de la Vanoise. Déjà il y a le maître, que tout le monde adore. Les élèves l'appellent par son prénom et le tutoient, mais il garde sa place de maître et les élèves le respectent. Il considère que le sport et l'ouverture sur le monde et l'actualité sont aussi importants que les autres matières. Il est toujours habillé de la même façon avec une laine polaire sur le dos en hiver, un T-shirt en été.
Alors la Vanoise, ça commence à la rentrée quand il fait faire de l'endurance à ses élèves. Eux qui jusqu'ici ont eu deux séances de sport par semaine, il les fait courir tous les jours dans la cour, d'abord cinq minutes, puis dix, puis quinze et ainsi de suite jusqu'à ce qu'ils aient acquis une certaine résistance à l'effort prolongé.
Et puis il y a une réunion avec les parents pour leur expliquer le but de la Vanoise. La découverte de la montagne, la vie en collectivité pendant dix jours, le travail scolaire qui sera quand même fait mais pas tous les jours, les activités le soir, les crozets qui sont comme des pâtes mais carrées, les joies de la montagne quoi. Et le beaufort, bien sûr.
Pendant la réunion, il donne une liste de tout ce qu'il faut. Le gros sac à dos pour le voyage, le petit sac à dos pour les randonnées, tout le linge marqué même chaque chaussette, les polaires, un peu de sous pour rapporter un cadeau (on a quand même mis un certain temps à manger le kilo de beaufort qu'elle nous a ramené), les chaussures de marche et les baskets. Quand ma petiote a mis son gros sac sur le dos la veille du départ pour essayer, elle est tombée en arrière tellement c'était lourd.
Le dimanche veille du départ de Virginie, nous avons mangé du poulet au fromage parce que c'était son plat préféré. Et l'après-midi, elle a tout vomi parce qu'elle avait trop peur de partir dix jours là-bas. Alors qu'elle ne le montrait pas beaucoup jusque là. Alors on a commencé par parler, la rassurer, lui dire que c'était normal d'avoir peur et qu'elle n'était pas la première à vomir à cause de ça. Elle a ensuite appelé sa grand-mère, ma maman, avec qui elle s'entend très bien. Ma mère lui a raconté qu'elle-même était devenue interne dès la sixième et qu'elle était malheureuse, sa maman aussi d'ailleurs, mais elles n'avaient pas le choix parce que c'était vers 1933 et qu'il n'y avait pas les facilités de transport d'aujourd'hui. Et qu'elle avait mal au ventre quand elle devait repartir mais qu'elle l'a fait. Et comme ma Virginie est une petite bête très courageuse comme sa mamie, ça lui a fait du bien et elle a raccroché le téléphone toute rassérénée.
Ensuite on a fait des habits de Barbie à l'ordinateur avec un CD-rom, un truc que je ne prenais jamais le temps de faire avec elle jusque là. On a imprimé, coupé, collé, c'était bien et ça a aidé ce dimanche à passer tranquillement.
Et finalement tout s'est bien passé pendant la Vanoise. J'allais voir tous les jours à l'école le compte-rendu que les élèves envoyaient par fax, avec des articles illustrés de dessins. Il faut dire que c'était au siècle dernier, Virginie a 21 ans, on ne communiquait par par téléphone portable et le maître n'avait pas d'ordinateur portable. Pour sa petite sœur, trois ans après, il y avait un blog sur internet où on lisait leur compte-rendu chaque soir.
J'y pense parce que demain, on mange du poulet au fromage. Sans Virginie bien sûr, je ne crois pas qu'elle en ait jamais remangé. Mais on va parler de la Vanoise, c'est sûr.

mercredi 20 janvier 2010

Mon premier tag

Puisque la douce Marie-Madeleine m'a envoyé un tag (le tout premier, j'adore faire des choses pour la première fois), je vais tenter de répondre au petit questionnaire qu'elle m'a transmis.

1-Plutôt corne ou marque-pages?
Je déteste qu'on abime les livres, alors marque-pages ! De préférence un objet détourné comme un ticket de cinéma, un billet de train, quelque chose qui a eu une vie avant.

2-As-tu déjà reçu un livre en cadeau?
J'ai toujours été entourée de beaucoup de livres, que ce soit chez mes parents ou chez moi, donc ce n'est pas vraiment un objet cadeau pour moi. Mais comme il sait que j'aime les photos et surtout les portraits, mon mari m'a offert plusieurs fois de beaux livres à ce sujet.

3 -Lis-tu dans ton bain?
Jamais de bain pour moi ! Mais quand j'étais plus jeune, j'y lisais des magazines et ils finissaient toujours tout gondolés en bas...

4-As-tu déjà pensé à écrire un livre?
Plus maintenant, je sais que je n'en ai pas le talent. Il fut un temps où je voulais écrire des contes pour enfants, genre l'histoire de la petite goutte d'eau qui avait fait le tour de la terre... J'ai bien fait de renoncer.

5-Que penses-tu des séries de plusieurs tomes?
Si c'est bien, j'adore. J'ai dévoré tout Zola, vingt volumes des Rougon-Macquart ne me font pas peur ! J'ai aussi tendance à écumer toutes les œuvres d'un auteur que j'aime.

6-As-tu un livre culte?
J'ai mes périodes plutôt. J'ai beaucoup lu et relu "Journal à quatre mains" quand j'avais vingt ans, je relis maintenant régulièrement "Les Buddenbroock" de Thomas Mann. Je lisais et relisais "La mousson" quand j'étais ado. Maintenant j'emporte souvent la biographie de François Truffaut co-écrite par Serge Toubiana, je l'avais emportée comme un doudou il y a un an pour aller me faire opérer.

7-Aimes-tu relire?
J'adore !

8-Rencontrer ou non les auteurs des livres qu'on a aimés?
Non. Pour moi, ça tue la magie de les voir "en vrai". J'ai deux ou trois livres dédicacés, je ne vois pas ce que ça leur apporte.

9-Aimes-tu parler de tes lectures?
Uniquement aux gens qui ont la même sensibilité que moi, ma fille aînée par exemple. J'ai horreur qu'on dise du mal d'un livre que j'ai beaucoup aimé et je préfère garder mon amour secret face à quelqu'un qui ne saurait pas l'apprécier. Pour les livres que je n'ai pas aimés en revanche, je veux bien partager mon désamour avec tout le monde !

10-Comment choisis-tu tes livres?
Parfois suite à un article. Sinon, je feuillette les premières pages et j'avoue être sensible à la beauté de la couverture. Ce qui réserve parfois des déceptions, évidemment.

11-Une lecture inavouable?
Beaucoup de romans policiers inégaux. Certains sont géniaux, d'autres très moyens. Pas grave, j'avale tout.

12-Des endroits préférés pour lire?
Mon lit !

13-Lecture en musique ou en silence?
Le silence. J'ai beaucoup de mal à m'abstraire de l'environnement extérieur quand je lis, j'ai toujours une oreille qui traîne...

14-lire un livre électronique?
Je n'en ai pas envie. Ou je l'imprimerais...

15-Un livre pour toi serait?
un moyen de n'être jamais seule.

16-Lire par dessus l'épaule?
Non. Je déteste qu'on me le fasse, d'ailleurs.

17-Lire et manger?
Si je mange seule, je lis toujours. Plutôt un hebdomadaire d'information ou un mensuel "féminin" (avec des articles genre "mon mari m'a quittée pour mon frère", "comment paraître dix ans de moins sans chirurgie", j'assume !).

18-Quel est le titre que tu lis actuellement et quel sera le prochain?
Je viens de finir "Sépharade" d'Eliette Abécassis et j'ai en réserve "Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates". Je ne suis pas sûre que ça me plaise, je ne suis pas fan de romans épistolaires.

19-As tu déjà abandonné la lecture d'un livre?
Oui, et sans honte. Quand ça m'ennuie, ça m'ennuie !

20-Qui tagues-tu?
Et pourquoi pas Lanfeust55 et Pierreline ? Et si ça les ennuie, elles ne le feront pas, ce n'est pas grave !

mercredi 13 janvier 2010


Je me demande pourquoi cette petite semaine passée en Macédoine il y a un peu plus d'un an m'a fait autant de bien. Mais en fait je sais pourquoi. C'était la première fois depuis très longtemps que je lâchais prise totalement. Pas d'enfants, pas de responsabilités, loin de chez moi entourée d'inconnus sauf une personne, le bonheur.
Et rien de tel que la Macédoine pour apprendre le lâcher prise ! Le premier jour, alors que j'attachais ma ceinture dans la voiture de la personne chez qui je logeais, elle m'a dit avec son délicieux accent "ce n'est pas la peine, ce n'est pas comme chez vous, ici ce n'est pas obligatoirrrrre". Mais pour moi ça allait de soi, obligatoire ou pas. Et puis les derniers jours, je ne la mettais plus non plus et je me sentais tellement libre ! Je sais que c'est idiot et que la ceinture est objectivement utile, mais ça m'a fait un bien fou de m'en libérer quelques temps. Peut-être aussi parce que depuis ces derniers mois où j'avais été malade, Olivier passait son temps à avoir peur pour moi et ça m'a fait du bien de me mettre un tout petit peu en danger sans son regard inquiet. Et puis objectivement, dans le bled où on était, il y avait plus de tracteurs que de voitures...
J'étais avec mon amie Laurence, trois de ses collègues de lycée et un groupe d'élèves de première et de terminale. Ça a été comme une cure de jouvence pour moi. On s'est payé des fous rires de gamins, on a bu de la bière locale, on a goûté au poivron sous toutes ses formes, on a bu du vin avec un pope, on a visité des tas d'églises, écouté des discours en macédonien, dissuadé une élève un peu crédule de devenir serveuse pour un Albanais rencontré dans un bar, emmené une autre élève chez le médecin de garde parce qu'elle était malade, appris que quand on disait d'une fille qu'elle était maquillée comme une Bulgare, ce n'était pas un compliment. Et aussi qu'on dit d'un fou qu'il a le cerveau qui respire. On a aussi soigné le pied écorché d'un élève avec de la rakia, sorte d'alcool à brûler local dont on nous a offert des litres. Sauf infection majeure, je ne pense pas ressortir la bouteille de sitôt.
Finalement, cette petite semaine a fini de me guérir. J'avais besoin de ce petit temps loin des miens pour repartir, entourée d'inconnus bienveillants, toute neuve finalement.

dimanche 10 janvier 2010

Patience and Fortitude

Parmi les valeurs à transmettre à nos enfants, je me demande si le courage n'est pas l'une des plus importantes. Je ne parle pas du courage avec un grand "C", celui qui fait risquer sa vie pour une juste cause, mais du petit courage quotidien, celui qui nous pousse à nous faire violence pour accomplir des gestes qui nous coûtent.
J'y pense particulièrement à cause d'une de mes collègues dont la fille de 15 ans fait une "phobie scolaire". C'est-à-dire qu'après une classe de troisième dans un collège de taille moyenne, elle est arrivée en seconde dans un grand lycée (qui ressemblerait à une aimable garderie comparé aux établissements des très grandes villes). Elle a décidé que ça ne lui plaisait pas, que ses copines n'étaient plus avec elle, que les profs étaient méchants. Bref, à force d'appels au secours à sa mère, qui est très fusionnelle avec elle, elle a fini par ne plus y aller du tout depuis deux mois. Elle devait reprendre en janvier mais n'a pas tenu.
Je sais que c'est facile de voir les choses de l'extérieur et que tout ne se soigne pas à coup de pied au c.. (ce que professait mon père, qui n'a par ailleurs jamais levé la main sur ses enfants, bien trop gentil pour ça), mais je vois ma collègue, je l'entends répondre au téléphone à sa fille et il me semble qu'elle a oublié de lui apprendre qu'il fallait parfois un peu de courage. Tous les enfants ont eu mal au ventre avant de partir à l'école, tous ont dit qu'ils avaient mal à la tête, envie de vomir, que tel professeur les détestait, que toute la classe étaient contre eux, etc. Il me semble que c'est le rôle des parents de les aider à y aller quand même, de les pousser vers la porte même si leur propre estomac ressemble à une sorte d'énorme nœud. C'est sûr que c'est plus facile de dire que les gens sont méchants, viens mets un DVD pendant que je te prépare une tisane, on va se faire une petite journée rien qu'à nous.
Ben oui bien sûr qu'il y a des sales profs, qu'on a tous eu des copains de classe qui nous brimaient, qu'on avait mal au ventre avant d'aller à la piscine parce qu'on savait que cet abruti de maître-nageur allait nous pousser dans l'eau. Mais je crois que le petit courage quotidien qu'on peut avoir aide à affronter les vrais ennuis qu'on a plus tard et à côté desquels une interro de maths au lycée ressemble à un doux rêve.
Je me demande si je ne suis pas en train de virer réac moi ?

PS : deux heures après ce billet, je viens à l'instant de lire le billet de Coumarine . Je ne parle en ce qui me concerne que des petites misères sans gravité auxquelles un enfant ou un ado peut être confronté. Face aux brimades dont elle parle, je serais la première à monter un créneau et je considère qu'un tel enseignant est indigne d'exercer.

mardi 5 janvier 2010


Mes beaux-parents sont des personnes de devoir. Je crois qu'ils n'ont jamais été vraiment heureux dans la vie. Ils viennent d'un tout petit village du sud de l'Aveyron, là où c'était encore un peu le moyen-âge quand ils étaient petits. Lui a perdu son père tout gamin, sa mère a élevé seule ses trois filles et son petit-dernier. Elle s'occupait de la petite maison et des enfants, et aussi de deux neveux orphelins à un moment je crois. Elle gardait les brebis, sonnait les cloches de l'église et faisait en plus de petits travaux pour gagner un peu d'argent, comme par exemple couper la paille en petits fagots après les moissons. Deux de ses filles ont commencé à travailler à peine sorties de l'enfance comme couturières chez les gens qui avaient besoin de leurs services. L'autre est devenue religieuse. Plus par devoir que par vocation, elle non plus n'a pas été très heureuse. Mon beau-père a toujours vénéré sa mère. Quand je l'ai connue, Mamie Rachel était déjà très âgée. C'était une toute petite bonne femme maigre, son éternel petit chignon rabougri coiffé d'un béret.
Le père de ma belle-mère était un aventurier pour son époque. Il adorait le vélo et le Tour de France et était parti s'installer à Paris avec sa femme pour y faire fortune. Je crois qu'il travaillait dans un garage, il aimait la mécanique. Ma belle-mère est née à Paris, dans le quartier que Robert Sabatier décrit dans "Les allumettes suédoises". Sa mère était très dépressive, elle a été hospitalisée un moment et ma belle-mère était hébergée chez sa tante, toujours à Paris. Quand Pépé Jean a amassé assez d'argent pour s'acheter une petite ferme, ils sont rentrés dans l'Aveyron.
Mes beaux-parents ont toujours fait passer le devoir avant tout. Il n'étaient pas très riches et avaient trois enfants. Ils étaient profondément catholiques et ont choisi de mettre leurs enfants à l'école privée, quitte à faire des sacrifices financiers. Tout ça pour que leur fils, qui a fréquenté l'école de garçons Saint-S... de la maternelle à la terminale, épouse une mécréante, ne se marie pas à l'église et ne baptise pas ses deux filles. Mais j'ai trop de respect pour les vrais croyants, même si je ne les comprends pas vraiment, pour accepter un mariage religieux de façade, juste pour avoir une cérémonie et de la musique. En plus j'ai horreur de l'orgue.
Quand je pense à leur vie, ça m'attriste un peu. Ils ne vont jamais au restaurant sauf les jours de trajet vers l'Aveyron (le travail de mon beau-père les a amenés dans l'Est dans les années soixante), il faut bien passer une nuit à l'hôtel vu la distance. Ma belle-mère n'est jamais allée à l'étranger et ne connaît presque rien de la France. Elle rêve encore de ses années d'enfance à Paris mais n'y est jamais retournée. Elle se reprend si le mot "j'adore" lui échappe et rectifie "on n'adore que Dieu seul". Son éducation austère l'a empêchée de montrer de la tendresse à ses deux filles et leur relation en souffre. En revanche, elle idolâtre son fils, peut-être aussi parce qu'il "remplace" un autre fils mort enfant. Et puis dans son éducation, les filles sont faites pour le devoir, il faut les éduquer, leur apprendre les tâches ménagères et tout le reste. Un garçon ce n'est pas pareil.
Je pense souvent à eux quand je laisse la vaisselle pour aller voir un film, quand je choisis d'aller me promener au lieu de passer l'aspirateur, quand je remets à demain ce que j'aurais pu faire le jour même. Il faut s'occuper de soi pour être heureux. Pas que de soi bien sûr, mais préférer un bon fou-rire à une maison impeccable, sauter dans les flaques avec un petit sans penser aux taches sur ses vêtements, s'asseoir un moment avec son mari le soir pour discuter de tout et de rien avant d'appeler les enfants, tant pis s'ils mangent un peu en retard. C'est ça qui leur a manqué pour être heureux.